Fraude : Toutes les entreprises sont des victimes potentielles

La fraude en matière civile ne se démarque guère de la fraude pénale. Il s’agit d’un acte qui a été réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à obtenir un consentement, un avantage matériel ou moral indu ou effectué avec l’intention d’échapper à l’exécution des lois.

Toutes les sociétés sont des victimes potentielles. Il est donc important que les entreprises identifient, évaluent et gèrent les risques que peut faire encourir la fraude à la pérennité de leur succès commerciaux.

1-      Qu’est-ce que la fraude ?

2-      Quels sont les types de fraude ?

3-      Sanctions et conséquences de la fraude.

4-      Prévention de la fraude.

1-   QU’EST-CE QUE LA FRAUDE ?

La Délégation nationale à la lutte contre la fraude coordonne la lutte contre les fraudes fiscales et sociales et le travail illégal. Sa définition est la suivante :

« Une irrégularité ou une omission commise de manière intentionnelle au détriment des finances publiques ».

Au sens « privé » du terme, la fraude peut se produire lorsque des faiblesses dans les processus, les contrôles ou encore des failles techniques sont exploitées afin d’obtenir un avantage.

Il y a alors détournement ou usage illégitime des procédures de toute entreprise, quel que soit son domaine d’activité.

Les fraudeurs sont aussi diversifiés que les actes qu’ils commettent et il n’existe pas de stéréotype adéquat pour décrire la catégorie d’individus qui peuvent, à un moment ou à un autre de leur vie ou de leur carrière, prendre part à une ou plusieurs actions frauduleuses.

Nous pouvons cependant distinguer 2 types de fraudeurs : opportunistes ou professionnels.

Le triangle de la fraude :

trianglefraude

Donald R. Cressey est à l’origine du « triangle de la fraude » en 1986 qui vise à caractériser l’environnement propice à un acte de fraude. Le Triangle de la fraude se compose de trois éléments : la perception d’incitations/de pressions la perception d’une opportunité et la justification rationnelle du comportement frauduleux.

Le fraudeur doit percevoir des pressions, incitations à la fraude (dettes personnelles, etc.). Ensuite, il doit percevoir une opportunité évidente afin de perpétrer la fraude facilement, et surtout il a besoin de justifier son acte pour le rendre acceptable à ses yeux. Cette justification rationnelle lui permet de croire qu’il n’a rien fait de mal.

2-   QUELS SONT LES TYPES DE FRAUDE ?

On distingue généralement trois grandes catégories de fraude :

  • les fraudes externes,
  • les fraudes internes,
  • et les fraudes managériales, ces dernières étant souvent « collectives et symptomatiques de défaillances dans les systèmes de contrôle interne », précise Fabien de Geuser*

Chacune de ces trois catégories se divise en deux modes opératoires :

  • Les fraudes peuvent résulter de comportements connus (supervised), qu’il faut alors repérer, ou bien,
  • de comportements inconnus, différents de la norme (unsupervised). « Ces fraudes inconnues sont le plus souvent externes ou managériales »*.

Les trois fraudes principales sont le détournement d’actifs, la présentation frauduleuse des états financiers et la corruption.

  • Le détournement d’actifs est de loin la fraude la plus fréquente, mais son incidence sur les comptes demeure limitée. On retrouve parmi les principaux schémas de détournement d’actifs, la fraude sur notes de frais, le paiement de fausses factures fournisseurs, le détournement de règlements clients ou le vol d’espèces.
  • La fraude comptable est plus rare, mais son incidence sur les comptes est généralement significative. Il s’agit notamment de la comptabilisation de revenus fictifs, par le biais d’émission de fausses factures clients, l’anticipation de produits ou encore l’émission de factures à établir.
  • La corruption quant à elle, peut se définir comme l’agissement par lequel une personne investie d’une fonction déterminée, publique ou privée, sollicite ou accepte un don, une offre ou une promesse en vue d’accomplir, retarder ou omettre d’accomplir un acte entrant, d’une façon directe ou indirecte, dans le cadre de ses fonctions. La corruption implique donc la violation, par le coupable, des devoirs de sa charge. Le droit pénal français distingue deux sortes de corruption : active ou passive

3-   SANCTIONS ET CONSEQUENCES DE LA FRAUDE

La crise accroît les risques

Une grande entreprise sur deux est touchée par la fraude dans le monde. Il en est de même en France. 43% des entreprises qui ont relevé des fraudes constatent une augmentation de leur nombre par rapport au passé. La pression au travail et la réduction des effectifs des équipes de contrôle accroissent le risque de fraude dans les entreprises. Par ailleurs, le profil du fraudeur évolue vers le middle management. Les entreprises sondées anticipent, un accroissement des détournements d’actifs et de la fraude comptable. La bonne nouvelle est que les dispositifs de contrôle interne détectent désormais une fraude sur deux. La tolérance zéro est désormais de mise (85 % des fraudeurs sont licenciés).

Le coût de la fraude

  • La performance financière

Les fraudes peuvent amener des frais supplémentaires dans l’entreprise. Si elles sont négligées, les pertes financières peuvent atteindre des niveaux réellement importants pour la performance de la société. Dans des cas extrêmes, la fraude a eu pour conséquences la faillite d’entreprises possédant un chiffre d’affaire de plusieurs milliards d’euros telles que Parmalat, Worldcom et Enron.

  • Dégradation de l’image de marque, de la réputation de la confiance portée à l’entreprise.
  • Certains actes peuvent causer des violations de la loi et entraîner des poursuites civiles ou criminelles contre les individus concernés et des amendes considérables

4-   PREVENTION DE LA FRAUDE 

S’il faut travailler à la détection des fraudes, le travail de prévention est tout aussi fondamental.

Gestion du risque

L’entreprise a un devoir et un intérêt certain à mettre en place des dispositifs de prévention. Ces moyens ont plusieurs objectifs qui sont principalement de sauvegarder la crédibilité et les actifs de l’entreprise, de favoriser des comportements vertueux, et de protéger les salariés contre des comportements indélicats.

Quelques clés :

  • contrôle interne : des audits internes ou externes sont susceptibles de conforter le dispositif à plusieurs niveaux : en élevant progressivement le niveau général des procédures de contrôle interne, en renforçant la culture de la supervision et du contrôle nécessaire à toute activité notamment en période de croissance, et en assurant, entre autre, une vérification indépendante et professionnelle des dispositifs de contrôle et de supervision. Les vérifications pourront porter par exemple sur les autorisations de dépenses ou d’engagements, sur les contrôles effectués par les contrôleurs de gestion, ou sur l’analyse des indicateurs d’alerte tels que les délais de paiement client, les taux de pertes sur stocks, les taux de marge au sein des filières, …
  • séparation des tâches : Des moyens efficaces existent comme des revues de supervision régulières ou des réallocations de responsabilités au sein de centres de services partagés. Les activités relatives aux achats, à la gestion de la trésorerie, à la gestion des créances clients, aux provisions pour actifs circulants doivent être supervisées avec attention. D’une manière générale, les notes de frais doivent être suivies, notamment dans les filières ou des dépenses en espèces peuvent intervenir.
  • Banques : Tracfin (Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits Financiers clandestins) est un organisme du Ministère de l’Économie et des Finances chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent.
  • Clients / fournisseurs qui refusent d’être complices
  • Vigilance de tous et de tous les instants…

* Source : Fabien de Geuser Docteur en Sciences de Gestion, enseignant-chercheur à ESCP Europe, professeur à HEC Lausanne.