Les mesures conservatoires prises contre une caution personne physique lorsque le débiteur principal est en période d’observation

Le principe de la suspension des poursuites contre la caution personne physique

En vertu du deuxième alinéa de l’article L.622-28 du Code de commerce, le jugement ouvrant une procédure de sauvegarde ou de redressement à l’encontre du débiteur principal suspend toute action contre les personnes physiques s’étant porté caution dudit débiteur principal, jusqu’au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation.Dès lors, un créancier d’une entreprise bénéficiant d’une procédure de sauvegarde ou de redressement voit l’ensemble de ses mesures prises à l’encontre de la caution personne physique suspendues, tant que la période d’observation du débiteur principal n’est pas terminée.

Un tel principe a été imposé par le législateur afin de ne pas décourager le dirigeant personne physique, bien souvent également caution des engagements de la société, à déposer le bilan, de crainte qu’il ne soit poursuivi immédiatement par les créanciers en sa qualité de caution.

L’obligation pour le créancier d’engager une action à l’encontre de la caution lorsqu’une mesure conservatoire a été prise

Le créancier, bien que privé de la possibilité d’obtenir immédiatement un jugement de condamnation à l’encontre de la caution personne physique, a toutefois la possibilité de prendre des mesures conservatoires afin de garantir sa créance jusqu’au terme de la suspension (alinéa 3 de l’article L.622-28 du Code de commerce). Il s’agira par exemple d’une saisie conservatoire sur son compte bancaire, d’une saisie conservatoire de ses biens meubles ou encore d’une hypothèque judiciaire provisoire sur son bien immobilier.

Or, l’article R.511-7 du Code des procédures civiles d’exécution exige du créancier qui a pratiqué une mesure conservatoire qu’il introduise une action en justice en vue d’obtenir la condamnation judiciaire de cette personne, dans le mois qui suit l’exécution de cette mesure. A défaut sa mesure conservatoire deviendrait caduque.

Un casse-tête pour les créanciers, au profit des cautions personnes physiques

Compte tenu des termes de l’article L.622-28 du Code de commerce, bien souvent les créanciers attendent la fin de la période d’observation du débiteur principal avant d’engager une quelconque procédure à l’encontre de la caution personne physique.

C’est dans ce cas de figure que les cautions personnelles bénéficient, de la suspension, de la possibilité de contester les mesures conservatoires prises à leur encontre.

En effet, les créanciers qui patientent jusqu’à la fin de la période d’observation du débiteur principal pour engager une action judiciaire contre la caution personne physique, ne pourront plus bénéficier de leur mesure conservatoire prise sur les biens de la caution, ladite mesure devenant caduque à défaut d’action à l’encontre de la caution, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure.

La Cour de cassation est venue clarifier la position à adopter pour les créanciers afin de respecter tant les dispositions de l’article L.622-28 du Code de commerce que celles de l’article R.511-7 du Code des procédures civiles d’exécution.

Une solution enfin claire de la Cour de cassation

Dans un arrêt publié au bulletin et rendu en date du 27 mai 2014, la Chambre commerciale de la Cour de cassation (pourvoi n°13-18018) a indiqué que le créancier ayant mis en œuvre une mesure conservatoire à l’encontre d’une caution personne physique, devait obligatoirement assigner au fond cette caution aux fins d’obtention d’un jugement de condamnation, quand bien même cette procédure serait ensuite suspendue.

Ainsi, la suspension s’entend non pas comme l’impossibilité pour le créancier d’assigner la caution personne physique aux fins de condamnation, mais comme la nécessité que la procédure soit « suspendue » une fois engagée.

En pratique, les créanciers qui bénéficient d’une mesure conservatoire contre une caution personne physique devront assigner cette caution dans le mois qui suit la mise en œuvre de la mesure et solliciter dans cette assignation :

  • la condamnation de la caution au paiement des sommes dues,
  • la suspension de l’instance jusqu’à la fin de la période d’observation du débiteur principal.

Cabinet Sonier- Avocats à la cour

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